Coup de folie avec Brad Jacobs
Cette semaine, John bavarde avec un homme qu’on ne présente plus, le médaillé d’or olympique en titre, champion canadien 2013 et vice-champion canadien 2015, Brad Jacobs. Une vraie force de la nature, Jacobs a mené sa bande vers succès après succès, mais il est aussi bien connu pour sa franchise quand il n’est pas sur la piste de glace. C’était une belle occasion de discuter avec Brad alors qu’il se prépare à se payer une sixième participation consécutive au Brier (sans compter son absence lorsqu’il concourait aux Jeux Olympiques).
Bienvenue à Coup de folie, une nouvelle série de Curling Canada où le comédien John Cullen s’entretient avec vos joueurs et joueuses favoris en vue d’amorcer une discussion où tous les coups sont permis. Chaque entretien consiste en huit questions, dont cinq questions régulières posées à chaque joueur ou joueuse, deux questions qui portent spécifiquement sur la personne interviewée, et une question qui aura été proposée par la personne interviewée précédemment.
1. Quel est le plus beau coup auquel tu aies jamais participé?
Brad Jacobs: Ben, évidemment, c’était le coup contre Kevin Martin aux Essais olympiques de 2013 pour mettre la main sur le premier rang au classement et accéder à la finale. C’était un coup énorme puisque cela signifiait la possibilité de disputer le droit de représenter le Canada aux Jeux Olympiques, et cette victoire sur Martin nous a renforcé la confiance pour la finale. Après ça, nous avions le sens d’être les maîtres de notre propre destin.
John Cullen: Combien de fois as-tu regardé la reprise?
BJ: Pas mal de fois. (rire) Je veux dire, la médaille d’or et le Brier ont été de beaux moments, mais ce coup spécifique a été le meilleur auquel notre équipe a jamais participer, et il est encore impossible d’y penser sans avoir la chair de poule.
JC: Et la fameuse célébration après ce coup…je crois que cela a ouvert la voie aux célébrations plus vivantes sur la piste; c’est plus acceptable maintenant, ça fait partie du match.
BJ: Je pense qu’il y a toujours eu des célébrations de ce genre sur la piste de curling, mais les gens ont compris que, à ce moment-là, l’émotion était tellement vraie et intense que notre célébration existe dans une classe à part. C’était un moment qui a attiré l’attention de tout un chacun, et peut-être c’est la raison pour cette tendance de célébration qui se répand à encore plus d’équipes de curling.
2. Quel joueur ou joueuse saurais-tu battre dans un combat corps à corps?
BJ: (Ryan) Fry, Je saurais battre Fry pour sûr.
JC: Ouais, je ne voudrais me battre avec les Harnden non plus. (rire)
BJ: Je le choisis surtout puisque toute l’équipe harcèle Fry, donc pour maintenir le statu quo, je dirais Fry pour sûr. C’est moi et Fry qui sommes les sacs de frappe de l’équipe, et je suis certain que si tu lui posais la même question, Fry te répondrait qu’il saurait me battre dans un combat.
JC: Et dans un match en équipe, toi et Fry contre les frères Harnden?
BJ: Les Harnden, sans équivoque. Impossible de gagner quand deux hommes s’affrontent à un homme et demi. (rire) Et juste pour clarifier, c’est Fry le demi. (rire)
3. Si une charcuterie tenait à baptiser un sandwich en hommage de toi, comment serait ce sandwich?
BJ: (rire) C’est vraiment la question?
JC: (rire) Bien sûr que si! Tu savais à quoi t’attendre avec cette entrevue.
BJ: Entendu, mais, euh …qu’est-ce que je dis? Quel type de viande je préfère? Nulle idée. Beaucoup de protéine, beaucoup de légumes, on va faire un sandwich santé. Une peu de vinaigrette italienne et de la mayonnaise, du sel, du poivre. Il faut garder la forme.
JC: Je suppose que c’est important. Tu le nommes comment, ce sandwich?
BJ: Appelons-le «Mise en forme». (rire) Mes coéquipiers me taquinent souvent puisqu’ils commandent des sandwichs, pâtes, hamburgers, des glucides à gogo. Je ne balaie pas, donc je ne brûle pas les calories. Donc je me limite à une salade, et ils se moquent de moi, et je réponds simplement «faut garder la forme.» (rire)
4. Lequel de tous tes boulots a été le pire?
BJ: Hmmm, c’est dur, cette question, puisque j’ai eu surtout des boulots très satisfaisants. J’ai eu de la bonne fortune à ce titre. Peut-être le pire – et c’était en fait un bon boulot, mais simplement le plus grand défi – a été un poste où je posais des cloisons sèches. J’ai fait cela pendant deux étés. J’ai beaucoup appris et ce n’était pas un mauvais boulot, mais à en considérer les longues heures et la saleté, c’était le pire de mes boulots.
JC: Je te comprends. J’ai travaillé dans un entrepôt pendant deux étés et je me souviens que, à la rentrée scolaire en septembre, il a fallu deux bonnes semaines pour vider toute la poussière de mes poumons.
BJ: Oui, exactement : les oreilles, les yeux, la bouche, le nez…la poussière partout. Je passais plus longtemps sous la douche à cette époque qu’à aucun autre moment de ma vie.
5. Si tu pouvais te faire confectionner une veste du genre «letterman», avec les initiales ou le logo de ton choix là-dessus, mais quelque chose d’autre que le curling, qu’est-ce que tu y mettrais?
BJ: J’y mettrais le logotype Nobis puisque je veux que la veste soit de la marque Nobis. (rire) Et leur logotype est resplendissant.
JC: Je vois ce que tu fais; tu fais appel aux commanditaires ici…chapeau!
BJ: Franchement, leurs vestes sont les plus confortables, sans mentir, sans exagérer. Nous avons visité une de leurs boutiques un jour, et nous avons essayé toutes les vestes, et chacune a été follement confortable. Nous avons été super chanceux en les décrochant comme commanditaire.
6. Bon, maintenant un couple de questions qui portent spécifiquement sur Brad Jacobs. Tu as une réputation de traiter de «pigeon» les choses ou les personnes que tu crois faibles ou nulles. Si tu avais à me donner ton classement actuel du top-5 «Pigeon Power», comment ce serait?
BJ: Franchement, je crois que cette expression une peu désuète; elle a suivi son cours. Cela a été amorcé par Ben Hebert, et il semble avoir la volonté de poursuivre, donc je dis que mon classement top-5 «pigeon» à l’heure actuelle est :
Numéro 5, Ben Hebert.
Numéro 4, Ben Hebert.
Numéro 3, Ben Hebert.
Numéro 2, Ben Hebert.
Et numéro 1…Ben Hebert.
JC: (rire) Ah, c’est l’unanimité. Je suis d’accord que c’est un peu vieux jeu, et je pensais que Benny en avait fini avec, et puis cette binette de pigeon est arrivée sur la scène et cela a donné à cette histoire un deuxième souffle.
BJ: Ouais, ça prolonge effectivement la durée. Je fais la binette de couronne suivie de celle du pigeon pour signaler à Benny qu’il est le Roi des pigeons. Sûr et certain qu’il inventera quelque chose de nouveau après que le pigeon aura rendu son dernier soupir, et les joueurs s’y accrocheront.
JC: Ce ne sera pas toi qui accoucheras d’une idée?
BJ: Non, nous ne sommes pas trop créatifs. Mais tiens, il y a une binette de mouette …(rire)
7. Comme bien des gens ont remarqué, aux parties de Skins, tu as changé de coiffure. Nous avions déjà vu la tête chauve, mais pas avec une barbe, et maintenant tu te fais un peu le Yukon Cornelius. Or, les rumeurs courent…que pense ton épouse, Shawna, devant ce nouveau look?
BJ: Écoute, John, je te dis, à cette étape de ma vie – j’ai une fille d’un an et un autre bébé pour bientôt– je tiens à écarter autant de stress que possible de ma vie. Si je peux porter une coiffure et une barbe à entretien minime, je suis pour. Et disons-le : la racine des cheveux n’est plus mon point fort. (rire)
JC: Oui, nous avons vu vous autres au sommet de votre jeu aux essais Olympiques, avec la tête chauve : est-ce que c’était un facteur dans ta décision de te raser complètement la tête encore une fois?
BJ: Ben, nous avons enfin signé une victoire à un tournoi cette année (le match Skins) après que je m’étais rasé la tête, donc peut-être que oui. Et j’ai toujours voulu porter une barbe, mais inévitablement je devenais frustré quand elle arrivait à cette étape inconfortable. Je jonglais avec trop de priorités cette fois pour remarquer l’inconfort, et maintenant j’aime beaucoup ma barbe.
JC: Et Shawna?
BJ: Elle n’aime pas trop. Je crois que les femmes en général n’en sont pas fanatiques, mais bon, elles devront vivre avec. (rire) Disons-le ainsi : ce n’est pas pour ma beauté qu’elle m’a épousé, ou si c’était un facteur, c’était un tout petit facteur. Donc même si elle n’aime pas ma barbe, je sais qu’elle m’aime tout de même.
8. Dernière question, qui vient de ma dernière invitée, Joanne Courtney. Si tu avais à changer une seule règle du curling, laquelle choisirais-tu, et pourquoi?
BJ: (réfléchit longuement) J’essaie de choisir les bons mots. À vrai dire, personnellement, moi et mon équipe ne sommes pas fans de certaines des techniques de balayage que bon nombre d’équipes ont adoptées, et notamment l’emploi d’un balai à poils pour faire courber la pierre. À mon avis, la marge d’erreur s’est agrandie et en conséquence, le jeu a diminué en précision. Je ne dis pas que nous ne le fassions pas. Nous le faisons; tout le monde le fait, mais c’est un point qui m’agace vraiment.
JC: Il y a eu pas mal de controverses à propos des fibres directionnelles ou de la technique de balayage, mais tu es le premier à aborder le point spécifique des poils. De prime abord, cela avait l’air d’être une platitude du genre «mais au moins les brosses à poils sont encore bonnes!» Tu veux approfondir sur cela?
BJ: Cela a été une année intéressante pour le curling, et je suis tout à fait pour l’interdiction de cette technique aussi. Je pense que nous avons vu, avec les brosses à poils, à quel point on peut faire courber les pierres …c’est un fait bien établi. Beaucoup d’équipes se sont servies de balais à poils dans le passé, et personne ne se plaignait jamais, mais maintenant, avec toutes nos connaissances sur la physique des pierres et de la technique, nous sommes en mesure d’user des poils comme jamais auparavant. Je pense que le curling est un jeu différent de ce qu’il était même il y a un an, et ce n’est pas pour le mieux.
JC: Ce sont des paroles sévères; je pensais que notre entrevue serait bien moins sérieuse! (rire)
BJ: Tout simplement, je pense que le jeu devrait récompenser et valoriser ceux et celles qui travaillent le plus fort, mais présentement, ces techniques et ces choix ne servent qu’à prêter un air plus compétent aux compétiteurs qui ne le sont pas autant que ça. J’espère que pendant la saison morte, on considèrera des mesures pour retrouver le niveau d’excellence et de pureté que nous avions dans le sport auparavant, puisque cette version du sport est celle qui nous avait séduits à nos débuts.
JC: Parfait, Brad. Des points vraiment valables, et je suis tout à fait d’accord avec toi. Est-ce que tu pourrais formuler une question pour la prochaine personne dans cette série d’entrevues?
BJ: Certainement : pourrais-tu me raconter un peu tes activités comme modèle de rôle pour les jeunes athlètes, et les choses que tu fais pour rehausser le profil du sport?
JC: Wow. Une question sérieuse; tu mets cette personne sur la sellette pour de vrai.
BJ: Je pense que davantage de joueurs et joueuses de haut niveau devraient s’y impliquer. Il faut nous mettre à renforcer la communauté, grandir nos clubs, et développer le sport. Je sais que tout le monde a beaucoup de choses sur les bras avec le boulot et la famille et tout cela, mais en tant qu’athlètes qui jouissent d’une certaine publicité à cause de ce sport, il nous incombe de redonner au sport et faire notre part. Je suis certain que la prochaine personne que tu rencontreras sera bien impliquée à ce titre, et je le crois important de souligner cet engagement devant tout le monde.
JC: Excellente question, merci. J’ai hâte d’entendre la réponse qu’on me donnera. Merci infiniment, Brad, et bonne chance aux éliminatoires du Nord de l’Ontario!
Ne manquez pas de suivre Brad sur Twitter @curlercups; de même pour John @cullenthecurler.